mercredi 30 novembre 2011

Baudelaire dit par Reggiani

Je suis tombée par hasard sur une lecture allemande et anglaise du classique Enivrez-vous de Baudelaire sur Youtube, puis me suis retrouvée complètement KO suite à cette (re)lecture qu'en avait jadis donné Reggiani.

mardi 29 novembre 2011

Fenêtre ouverte

« Je l’ai déjà dit à l’un de vos collègues : un bon livre c’est quand on a envie de tourner les pages pour connaître la fin de l’histoire et qu’on se retient de le faire par crainte de rater les qualités de l’écriture… » (p. 53)

« Selon lui, la première phrase devrait être comme une fenêtre ouverte, une lumière dans la nuit ou le sourire d’une inconnue, c’est-à-dire une chose si attirante et séduisante qu’on ne puisse résister à l’envie de lire la suite. » (p. 120)

Jacques Poulin, Les yeux bleus de Mistassini

Parfois, on a besoin de retrouver un auteur après deux ans pour que l'admiration qu'on lui porte ressurgisse, intacte...

dimanche 27 novembre 2011

Voyage chez nos voisins du Sud (5/5)

La prochaine métropole, celle dans laquelle Starship disait We Built This City on Rock and Roll, est aussi célèbre


parce qu'un certain Tony Bennett Left my Heart in San Francisco.


Pour finir le périple, rencontrer les California Girls (The Beach Boys)


en étant en plein milieu d'un California Dreamin' (The Mamas and the Papas).


Une petite visite à San Jose sans Burt Bacharan

en s'assurant de ne pas aller à l'Hotel California avant de partir.


Retour la frontière, en passant par le Ohio de Crosby, Still, Nash et Young.


Don't Stop Believing, dans les quartiers miteux et pauvres de Détroit pour finir ce Journey.


Back in the USA, à la manière de Chuck Berry, d'ici peu?

samedi 26 novembre 2011

Voyage chez nos voisins du Sud (4/5)

Se sentir chez soi, Sweet Home Alabama (Lynyrd Skynyrd), surtout grâce à l'hospitalité légendaire des gens de là-bas.


On aurait pu se dire Mississippi, comme John Oates le disait, mais pas vraiment le temps.


Vers l'autre côté du pays, faire un petit arrêt dans Hazard, ville inconnue contrairement à Richard Marx.


Dans le même état, Nebraska sur un air lugubre en écoutant le disque éponyme du Boss.

vendredi 25 novembre 2011

Voyage chez nos voisins du Sud (3/5)

Vers les États sécessionnistes, Kentucky Woman de Neil Diamond


avant de retrouver My Old Kentucky Home (Johny Cash).


Peut-être même se souvenir de la Blue Kentucky Girl (Loretta Young), celle qui, sait-on jamais, aurait pu...


Des larmes dans la Kentucky Rain en pensant à tout ça et au King lui-même.  


Georgia on my Mind, sans besoin de référence.


Visiter Jackson au Tennessee sur des airs de Johnny Cash


et avoir une envie folle de Walk in Memphis (Marc Cohn).

jeudi 24 novembre 2011

Voyage chez nos voisins du Sud (2/5)

La Pennsylvanie, ça te dit? Oui, hein? C'est ce que je pensais. En arrivant et en voyant William Penn, on ne peut s'empêcher d'écouter Philadelphia de Neil Young.


Les mains dans les poches, en déambulant dans les Streets of Philadelphia (Bruce Springsteen),


on se dit que vraiment, c'est Philadelphia Freedom cet endroit (Elton John).


Comme toute bonne chose à une fin, on quitte en se disant Goodbye Philadelphia, peut-être même qu'une station de radio ferait jouer Cincotti à ce moment.


Garden State. Atlantic City, la ville du vice aux dires de Bruce Springsteen.


L'important, ce serait d'être avec sa Jersey Girl (Tom Waits), celle qui vous accompagne pendant tout le voyage.


La American Pie, la musique de Don Mclean.

mercredi 23 novembre 2011

Voyage chez nos voisins du sud (1/5)

Vous me connaissez, j'aime les échanges.  J'échange du répertoire avec un ami depuis plusieurs mois déjà. Selon les jours, cela peut aussi bien être du Bach que du jazz, du Rihm que du Brahms, du Duran Duran que du Pärt. Il est particulièrement en répertoire contemporain américain, je suis plutôt du genre touche-à-tout, cela donne souvent des propositions assez étonnantes, qui laissent rarement indifférentes. Il y a quelques jours, il me proposait un voyage pop chez nos voisins du sud. Avec sa permission, je vous invite à m'y suivre pendant les cinq prochains jours. All aboard!

En traversant la frontière, avec The Border d'America dans les oreilles,


il faudrait se diriger vers le Big Apple, le tout dans un New York State of Mind comme Billy Joel l'a si bien montré.


Rendu là-bas, passer sur les avenues et entendre The 59th Street Bridge Song, peut-être par Paul Simon lui-même s'il se décide à surprendre les gens sur la rue concernée!


Mais, comme on le sait, New York is a Woman (Suzane Vega) et peu importe l'endroit, elle sait bien nous charmer.


Un Breakfast in America, sans nécessairement être un Supertramp, avant de traverser le fleuve vers un autre État.


Boston, More Than a Feeling.


En marchant dans les rues de la vieille ville, écoutant d'une oreille distante Sweet Caroline en septième manche au Fenway Park, Neil Diamond en personne derrière le micro.


Une discothèque avec les Bee Gees et pourquoi pas Massachusetts tant qu'à y être?

mardi 22 novembre 2011

Joyeuse Sainte-Cécile

Que vous soyez musicien, mélomane ou même si la musique ne joue qu'un rôle secondaire dans votre existence, vous voudrez sans doute prendre un instant pour penser à Sainte Cécile, la sainte patronne des musiciens. Vous pourriez par-exemple regarder ce documentaire mettant en lumière des pages de Purcell et Haydn consacrées à cette inspiratrice.

Sinon, je vous propose trois époques, trois langages, trois déclinaisons...





lundi 21 novembre 2011

Un salon sous le signe des rencontres

Je rassure tout de suite Le Papou qui craignait que je ne fasse sauter ma carte de crédit en me mêlant au 125 000 lecteurs et curieux qui se sont pressés (ceci explique certainement les embouteillages dans les allées, hier particulièrement) au Salon du livre de Montréal. En effet, je n'ai acheté que deux livres: le dernier Emmanuel Carrère, que j'offrirai à ma mère dans quelques jours pour son anniversaire (très belle dédicace de l'auteur, d'ailleurs), et le dernier Catherine Mavrikakis (qui se souvenait de moi d'il y a deux ans et a sorti un très joli stylo-feutre rose pour m'écrire un petit quelque chose).  Pourtant, j'ai fait trois sauts au salon, à coups de deux ou trois heures à la fois.

Alors, me suis-je complue dans les étalages? Pas tout à fait. Deux des trois passages étaient essentiellement consacrés à la rencontre d'éditeurs et d'attachés de presse, histoire de leur rappeler (ou leur parler de) l'existence de La Recrue du mois et  au suivi auprès d'auteurs qui, à un moment ou un autre, avaient été lus par l'un ou l'autre membre du collectif. Recrue un jour, recrue toujours? Il semble que, une fois mis en lumière, les auteurs continuent de se tenir au courant des nouveaux titres et reviennent nous voir. Tant mieux! Petit velours également quand j'ai aperçu, non pas une fois, mais bien deux, une phrase extraite d'un commentaire de lecture proposé dans le cadre du webzine, adroitement placé afin de mettre le livre en valeur. Si parfois (souvent), j'ai eu l'impression de prêcher dans le désert avec ce projet, ces retours m'ont permis de constater que le rôle de la promotion restait essentiel et méritait qu'on y consacre quelques heures bénévoles ici et là.


Le samedi, j'ai triché et ai plutôt opté pour la rencontre Emmanuel Carrère / Jean Rolin, amis dans la vie, offerte dans le cadre du salon par ma librairie indépendante préférée, Olivieri. J'ai aimé la fièvre à peine retenue avec laquelle ils parlaient de leurs plus récents ouvrages, de la façon dont Rolin a abordé Le ravissement de Britney Spears ou des hésitations de Carrère qui, en milieu de parcours, a considéré arrêter la rédaction de Limonov, se demandant sérieusement s'il n'était pas en train de faire l'apologie d'un simple fasciste.

J'ai aussi décidé de me faire plaisir et d'aller rencontrer des auteurs qui m'avaient touchée. Outre Carrère et Mavrikakis, j'ai aussi échangé avec Mathieu Blais (je parlerai bientôt de sa poésie), particulièrement allumé et presque ludique, Annie Dulong (j'en suis aux dernières pages de son roman Onze, dont je reparlerai dans le prochain numéro de La Recrue), Nicolas Gilbert (avec lequel j'ai aussi bien parlé de ses livres que de musique, ce dernier étant également compositeur), Guy Lalancette (dont j'avais beaucoup aimé Le bruit que fait la mort en tombant, avec lequel j'ai eu une conversation presque intime sur la mort et les liens qu'elle ne rompt jamais entièrement), Edem Awumey (un être particulièrement délicat et charmant, qui avait l'air de trouver ahurissant que j'aie lu et aimé ces deux derniers titres) et Robert Lalonde (que j'ai beaucoup lu, qui avait annulé sa séance de signature la dernière fois que j'avais voulu le rencontrer).

Et puis, bien sûr, le salon, c'est surtout le plaisir de retrouver des copines lectrices, de croiser des amis qui y travaillent, de noter des titres (surtout des premiers romans, bien sûr) et de vivre, quelques heures, au rythme bruissant des pages partagées.


samedi 19 novembre 2011

La deuxième fois...

Je ne vous referai pas le coup d'une nouvelle critique de l'opéra-BD Les Aventures de Madame Merveille, car elle ne saurait être diamétralement opposée à celle que j'avais commise lors de la création de l’œuvre en mai 2010. Bien sûr, je savais exactement ce qui allait se produire. Pourtant, j'avais très hâte de retrouver les coups de crayon des illustrateurs, particulièrement ceux de Michael Cho (Je t'aime Catherine) et Pascal Girard (Un gros osss) et de pouvoir me réapproprier la partition autrement. Après tout, comment peut-on espérer tout capter d'une pièce contemporaine à la première écoute, quand les repères habituels sont floués et qu'en plus, on aborde un genre hybride, non balisé, comme celui de l'opéra-BD?

La partition d'André Ristic m'a paru encore plus ludique qu'à la première écoute (notamment grâce à ses décapants effets de percussions et de sons pré-enregistrés) et les chanteurs ont su tirer leur épingle du jeu avec beaucoup de conviction, même si on perdait parfois le baryton de Pierre-Étienne Bergeron dans les ensembles (peut-être n'était-ce qu'une question de calibration des micros sans-fil). La direction de Véronique Lacroix s'est quant à elle révélée précise et fluide à la fois. On sentait que la partition était maintenant parfaitement intégrée et que musiciens et chef pouvaient enfin vraiment s'amuser avec celle-ci.

Je suis sortie de la salle, le sourire aux lèvres, inconsciente que j'allais faire une rencontre qui me réconcilierait d'un seul coup (si besoin était) avec le rôle de passeur que j'ai choisi d'adopter. En effet, alors que je conversais avec la musicothécaire de l'ECM+, un jeune homme que je n'avais pas vu depuis plus de deux ans s'est avancé vers nous. Je l'ai connu enfant, je l'ai vu développer un intérêt poussé pour la guitare au secondaire, j'ai échangé avec lui sur le monde musical à quelques reprises, répondant à une série de questions formulées. Il a expliqué à mon interlocutrice qu'il me connaissait et que, de fait, c'était grâce à moi, car je lui avais déniché un billet pour le concert consacré à la création contemporaine donnée par l'OSM en octobre 2008 (programme Ligeti, Prévost, Reich, Vivier et Frehner), qu'il n'avait pourtant pas entièrement digéré ce soir-là (il était parti à l'entracte, vaguement dépassé), qu'il avait pris la décision il y a un an de se diriger... en composition au Cégep Saint-Laurent! Aucun doute: je devais avoir la mâchoire décrochée!

Il m'a ensuite parlé d'une partition sur laquelle il travaillait, qui serait lue en février lors de l'événement Générations 2012 de l'ECM+, me confiant qu'il avait regardé la violoncelliste jouer avec un intérêt décuplé, sachant qu'elle serait celle qui la jouerait. Nous avons ensuite continué à échangé sur l'électroacoustique, Ligeti, Stockhausen (je ne suis pas nécessairement convaincue), l'importance du lyrisme, de toucher l'auditeur, même si on n'utilise que quatre notes. De toute évidence, nous parlions le même langage. Après l'avoir quitté, je me suis dit que, parfois, la vie vous fait quand même de ces clins d’œil incroyables...

jeudi 17 novembre 2011

Le retour de Madame Merveille

Oui, je sais, les livrophiles et livrophages salivent, puisque le Salon du livre de Montréal est maintenant ouvert. Une semaine chargée en perspective pour ceux qui aiment découvrir de nouveaux titres, s'entretenir avec des auteurs ou tout simplement profiter de l'occasion pour se retrouver entre copains dans les allées plus ou moins encombrées selon les heures.

Ne m'y cherchez pas ce soir car je serai à la première d'une nouvelle série de représentations des Aventures de Madame Merveille, cet opéra-BD créé en mai 2010 par l'ECM+. J'avais regretté alors que le tout ne soit présenté qu'à deux reprises. Bonne nouvelle, le projet reprend vie pour huit représentations (à Montréal, Sherbrooke et Lennoxville) et petits et grands pourront découvrir la partition d'André Ristic, servie par sept musiciens et quatre chanteurs invités et les projections de bandes dessinées conçues par les artistes graphiques renommés Michael Cho, Pascal Girard, Scott Hepburn et Cameron Stewart.  Les dates et lieux de représentations sont ici...

mardi 15 novembre 2011

L'homme blanc continue de rafler les honneurs

On vient tout juste d’annoncer que le premier roman de Perrine Leblanc, L’Homme blanc, a remporté le Prix littéraire du Gouverneur général dans la catégorie « romans et nouvelles ». Le communiqué souligne que le roman « nous convie à un voyage à travers une tranche d’histoire où un personnage profondément humain atteint l’universel. Un roman qui nous montre que le destin n’est jamais prévisible et qui témoigne avec force que même la blancheur a des nuances inusitées. » Le jury comprenait Salah Benlabed (Montréal), Nadine Bismuth (Montréal) et Alain Bernard Marchand (Ottawa).

Parmi les autres lauréats, je suis ravie de retrouver l'excellente traduction de Toxique ou L’incident dans l’autobus de Greg McArthur réalisée par Maryse Warda et devrai me procurer impérativement le lauréat catégorie « essais »: Wanderer : essai sur le Voyage d’hiver de Franz Schubert de Georges Leroux, aux Éditions Nota bene, livre qui m'a complètement échappé lors de sa sortie.

On peut retrouver le nom de tous les lauréats ici...

Le 15, jour de Recrue

Novembre, mois morose? Pas pour La Recrue du mois! La nuit tombe à 17 h? Tant mieux! Cela permet de passer la soirée avec un livre sans culpabilité et nous avons nombre de titres intéressants pour vous ce mois-ci!

Baldam l’improbable, notre Recrue, nous propose une incursion dans un univers décalé, pourtant simple projection de celui dans lequel nous vivons aujourd’hui. Baldam, « répondant universel », « trop médiocre pour se découvrir exceptionnel », espère accéder au Club des 5000, une vision magnifiée des fameuses 15 minutes de gloire proclamées par Andy Warhol.  Grâce à une langue décapante et une maîtrise certaine de la formule, Carle Coppens signe ici un premier roman foncièrement original, qui n’a laissé aucun de nos chroniqueurs indifférent.

Le vent souffle certes, mais il se veut vent de renouveau, alors que deux autres plumes se joignent à l’équipe.

Pour continuer de lire cet éditorial et découvrir ce que les chroniqueurs ont pensé de Baldam l'improbable ou céder à l'attrait d'un des sept titres proposés en repêchage, c'est par ici...

lundi 14 novembre 2011

Céder à l'enchantement

Au milieu d'une saison écourtée, relativement conservative, l'Opéra de Montréal ose offrir en première québécoise Rusalka de Dvorak, connu des amateurs d'art lyrique grâce à son magnifique « air à la lune » (entendu dès le premier acte, juste avant que la nymphe des eaux accepte les plus grands sacrifices pour enfin connaître l'amour charnel du prince), mais sinon peut-être plus difficile à vendre. Peut-on encore espérer séduire un public parfois frileux? Oui, si l'on en croit la production, réussie à plus d'un niveau, présentée en première samedi soir salle Wilfrid-Pelletier.

(La photo est d'Yves Renaud.)

Quoi qu'aient affirmé nombre de prépapiers publiés, l'histoire de Rusalka n'est aucunement difficile à suivre. Tout un chacun garde en mémoire l'histoire de la Petite sirène, que ce soit dans la relecture d'Andersen ou la version épurée (ou aseptisée) qu'en a tiré Walt Disney. Ici, l'immortelle est prête à renoncer à ses acquis, troublée par ce prince qui se baigne dans ses eaux à la nuit tombée. Comme plusieurs, elle connaîtra un instant d'extase, espérera connaître la félicité éternelle, mais se verra trahie par celui à qui elle a tout sacrifié, un être lâche comme le sont souvent les hommes. Dvorak mise sur ses dons évidents d'orchestrateur pour transmettre le récit de cet amour condamné avec raffinement et poésie. La musique, moteur du propos,  enveloppe le spectateur dans un cocon qui favorise l'évasion dans un monde imaginaire, même si elle n'est pas ponctuée d'airs attendus.

Au sein de la distribution internationale, il faut saluer la présence scénique de Kelly Kaduce en Rusalka qui habite l'espace, même quand elle ne chante pas (alors qu'elle assiste, impuissante et muette, à la trahison de son bien-aimé), la puissance remarquable d'Ewa Biegas (dans le rôle de la princesse étrangère aux charmes de laquelle le prince cédera) et l'aplomb de Robert Pomakov en roi des eaux. Khachatur Badalyan n'aura pas réussi à me convaincre dans le rôle du prince, peinant par moments à s'extraire de la pâte sonore de l'orchestre et à donner une crédibilité au personnage.

Grâce à une technologie particulièrement efficace, composée d'un dispositif de panneaux à diodes électroluminescentes (DEL) qui permet la projection (sur les trois surfaces verticales et le plancher) d'une multiplicité d'éléments visuels et d'éclairages, la scénographie somptueuse projette d'emblée le spectateur dans un univers parallèle, entre la profondeur des fonds marins et la touffeur de la forêt (le confondant parfois), entre jour et nuit, entre rêve et réalité. Cet encadrement visuel permet également de mieux délimiter la scène, facilitant par exemple des superpositions entre avant-plan (par exemple quand Rusalka hésite avant de se présenter au bal) et arrière-plan (alors que des danseurs évoluent derrière un tulle). Les chanteurs peuvent aussi plus facilement projeter leur voix, l'« action » se déroulant plus près du spectateur.

Si ce dernier accepte de pratiquer le lâcher prise et de se laisser porter par ce qu'il voit, ce qu'il entend, ce qu'il ressent, il sortira de sa soirée envouté. Cela n'arrive certes pas si souvent à l'opéra...

En complément, cette vidéo vous permettra de mieux saisir la puissance des éléments visuels. Il vous reste trois soirs pour vous glisser en salle: demain, jeudi et samedi.

vendredi 11 novembre 2011

Devoir de mémoire

Le programme d'hier soir de la SMCQ se voulait un hommage à Maryvonne Kendergi, qui se décrivait elle-même comme la « vieille grand-mère » de la musique contemporaine. Table ronde proposée avant le concert, exposition dans les foyers de la salle, vidéo de présentation avant le concert, la SMCQ a honoré de noble façon la mémoire de cette pionnière. Le concert, à géométrie variable, s'inscrivait également dans le cadre de la série Hommage à Ana Sokolovic, née à Belgrade en 1968, mais installée au Canada depuis le début des années 1990. Il comportait donc deux œuvres de la compositrice: son Hymne d'Orford, commande passée par le Centre d'arts Orford pour son 60e anniversaire, qui tisse en une même courte pièce musique traditionnelle serbe et rythmes québécois, hors-d’œuvre sympathique de trois minutes, et sa Ciaccona (datée de 2002), basée sur huit accords, en sections contrastantes misant sur les superpositions de textures et d'attaques.

Entre les deux, Walter Boudreau avait glissé une relecture de La création du monde de Milhaud, ballet créé à Paris en 1923, aux rythmes africains fortement infusés de jazz, qui prenait ici une couleur presque postmoderne, juxtaposé aux autres œuvres présentées. Marc Boivin et Chi Long offraient une nouvelle interprétation dansée de l’œuvre dans une vidéo qui, par moments, distrayait plus qu'elle ne renforçait le propos musical. J'aurais peut-être souhaité une direction un peu plus « musclée » ici et là, mais je tiens à saluer la sonorité riche et ample, particulièrement raffinée, de la saxophoniste Chantal Leclerc, qui a brillé lors de toutes ses interventions. La vidéo m'a semblé mieux intégrée dans Chute libre, création de Julien-Robert Legault Salvail particulièrement atmosphérique.

La SMCQ innovant hier en ouvrant sa salle de concert aux internautes du monde entier, j'ai quitté en vitesse à l'entracte, histoire de vivre la deuxième partie du concert autrement. Saluons ici les prises de vue dynamiques, la qualité de la transmission et le plaisir réel d'avoir l'illusion de se glisser presque littéralement sur la scène du Centre Pierre-Péladeau. Music for a Thousand Autumns d'Alexina Louie fait la part belle au piano et aux percussions (Matthieu Fortin a su donner à la partie de piano, notamment la longue cadence, densité et brio), en trois mouvements, dans lesquels la compositrice tresse adroitement des éléments de musique traditionnelle chinoise aux textures instrumentales. La pièce, écrite peu de temps après la mort prématurée de Claude Vivier, se veut un hommage au compositeur et une réflexion sur le rôle de l'artiste. « Sa mort m’a fait beaucoup réfléchir à la contribution de l’artiste au monde et à ce qui existe après la mort de celui-ci. Il m’est apparu très clairement durant la composition de l’œuvre que c’est notre musique qui reste très longtemps après que nous soyons partis », explique judicieusement la compositrice dans sa note de programme.

La soirée s'est terminée sur la création de Musiques immergées d'Alex Pauk, pour ensemble instrumental plus imposant et bande, reproduisant certains sons naturels issus de l'environnement (pluie, vent, vague, chant d'oiseaux, tonnerre, etc). Tout au long de la pièce, on assiste à une juxtaposition entre sonorités orchestrales et sons naturels, tour à tour traitée de façon antagoniste, comme une superposition de couches ou en jouant sur les glissements de masses sonores. Introspective, poussant à la réflexion, à percevoir plus loin que les sons entendus, les apparences, les diktats, la pièce s'avère particulièrement efficace et continue d'habiter, les dernières notes envolées. Elle mériterait sans aucun doute d'être entendue de nouveau ou enregistrée.



jeudi 10 novembre 2011

Chutes libres

La Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ) se joint aux autres organismes novateurs qui proposent aux internautes une expérience de concert en direct. En effet, le concert de ce soir, Chutes libres, un hommage à la grande dame de la musicologie Maryvonne Kendergi (qui nous a quittés en septembre), sera proposé gratuitement aux internautes en direct ce soir au www.smcq.ca dès 20 h - en temps réel donc.

On pourra lors du concert entendre la création montréalaise d'Hymne d'Orford ainsi que Ciaccona de la compositrice Ana Sokolović,  honorée dans le cadre de la Série Hommage 2011/12, Music for a Thousand Autumns d'Alexina Louie et la création de Musiques immergées d'Alex Pauk. On pourra aussi apprécier sur grand écran une improvisation du danseur Marc Boivin, sur La création du monde (1923) de Milhaud, alors qu'une seconde vidéo accompagnera Chute libre de Julien-Robert Legault Salvail, interprétée par des musiciens en chair et en os.

Je serai en salle pour ma part et dispose d'un deuxième billet. Si l'un de vous souhaite se joindre à moi, n'hésitez pas à communiquer avec moi par courriel au cours des prochaines heures.



mardi 8 novembre 2011

Classical Music

Parfois, le monde est un village global. J'ai ainsi pu écrire un article récemment pour Classical Music, un magazine spécialisé britannique, sur les défis rencontrés par l'équipe d'acousticiens et les musiciens, maintenant que la Maison symphonique de Montréal est devenue la nouvelle résidence officielle de l'OSM. L'article est publié dans le numéro courant du magazine. (En cliquant sur l'image, vous pourrez lire le tout plus aisément.)

lundi 7 novembre 2011

Le seul instant

Dans Le seul instant, Robert Lalonde propose un journal de réflexion plutôt que de création, qui contient nombre de citations percutantes, toujours aussi pertinentes aujourd'hui qu'au moment où elles avaient été écrites. J'en partage quelques-unes ici.

« Être écrivain, c’est devenir un autre. Être écrivain, c’est devenir quelqu’un d’étrange, un étranger : il faut se mettre à se traduire soi-même. » (Enrique Vila-Matas)

« Si ce que l’on fait donne sur l’infini, si on voit le travail avoir sa raison d’être et continuer au-delà, on travaille plus sereinement. » (Van Gogh à son frère Théo)

« Tout le visible tient à l’invisible, l’audible à l’inaudible, le sensible au non-sensible. Peut-être le pensable tient-il à l’impensable? » (Novalis)

« Nous nous racontons tous l’histoire de notre vie dans l’illusion de continuer à être nous-mêmes. Nous vivons dans l’idée que nous ne pouvons pas nous connaître, mais que nous pouvons nous raconter. » (Vila-Matas)
« Seuls les peintres survivent au soleil : ils le capturent grâce aux pigments floraux de leurs peintures et aux poils animaux de leurs pinceaux. Les peintres sont des êtres de la lumière et de la terre. Les écrivains sont des créatures de l’océan : notre encre provient des monstrueux calamars tapis dans les profondeurs. » (Martin Page, De la pluie)

vendredi 4 novembre 2011

Rose déluge

Sambo, un jeune Togolais, doit honorer une promesse faite à sa tante Rose et enterrer ongles et cheveux à la Nouvelle-Orléans, ville qui est toujours restée pour elle mythique. Louise, aspirante danseuse, s’apprête à monter dans l’autobus qui la mènera à New York. Elle souhaite aussi bien s’y réaliser en tant qu’artiste que fuir quelques démons intérieurs.

Dans les premiers chapitres, ils se racontent en alternance. Le lecteur hésite sur la façon de s’approprier leurs destins, troublé par la structure narrative, tout semblant de prime abord séparer les deux héros. Et puis, comme dans l’histoire, tout bascule au moment de leur rencontre, à Hull. Les mélodies que l’on croyait indépendantes deviennent contrepoint l’une à l’autre, certaines interrogations sur le devoir de mémoire, le déracinement, les liens familiaux, se répondant, en une superposition de lignes au grand lyrisme, porté par le souffle puissant de l’écriture d’Edem Awumey, sélectionné sur la première liste du Goncourt en 2009 pour Les pieds sales.

Alors que dans ce dernier, l’auteur parlait de destins qui se fracassaient sur les pavés de Paris, le voyage se veut cette fois avant tout intérieur, malgré les kilomètres avalés, du Togo à la Louisiane, avec détour par le Canada. Grâce à des retours en arrière astucieusement intégrés, dépourvus de toute lourdeur, Edem Awuney dresse un portrait troublant de Lomé, la capitale du Togo, sans taire les abus de pouvoir occidentaux en Afrique. Servi par une langue poétique et pourtant jamais ampoulée, Rose déluge rend floue la frontière entre rêve et réalité, hier et demain, ailleurs et ici. On se laisse porter par une voix distincte, dense, chose trop rare.

« … disparition, extinction des corps et des mots, le beau français des bayous y passera, cette langue à laquelle je ne comprends rien, ni moi ni les fils de Cajuns devenus Américains, leurs chants, leurs histoires de clairs de lune vont s’effriter, s’effacer mot après mot pour ne laisser qu’une page blanche de l’absence de mots pour dire qu’ils n’ont jamais existé, à l’heure où je te parle, cette belle langue, ils ne sont pas plus de mille à la parler, c’est l’automne de leur chant, quoique… »

L'auteur parle ici de son livre:
Edem Awumey, auteur de « Rose déluge » from Les Éditions du Boréal on Vimeo.

Ce livre a été lu dans le cadre de l'opération Masse critique Québec de Babelio.

mercredi 2 novembre 2011

Der Erlköning

Parce que c'est le rêve de tous les pianistes de se voir ouvrir les portes de l'usine Steinway, parce que j'aime les arrangements et la fougue du duo Anderson & Roe, parce que Le roi des aulnes est peut-être bien mon lied préféré de Schubert...