mercredi 23 mai 2012

Pour Leonard Cohen

« L'œuvre de Cohen comme point d’impact et comme source d’inspiration. » Voilà ce que propose le dernier numéro de la revue Moebius, piloté ici par Kateri Lemmens et Charles Quimper. Mais comment peut-on s'approprier un tel mythe? En citant des chansons éternelles, en racontant une rencontre avec le géant, en transposant l'essence du poète dans un autre personnage qui lui ressemble sans être lui, en flouant les frontières entre les genres aussi, bien sûr, car Cohen ne déteste rien plus que les étiquettes réductrices.

Cela donne un objet plutôt hétéroclite, mais non dépourvu de qualités. Peut-être parce que le géant n'est pas encore mort, qu'il continue de hanter l'imaginaire de certains auteurs ayant répondu à l'appel, plusieurs textes restent extrêmement sages. On se prosterne, on rend hommage, mais en tremblant presque, histoire de ne pas pervertir, ternir l'image du chantre montréalais. On retiendra néanmoins certaines perles.  Thomas Hellman, avec « Phil » propose un regard volontairement dénué d'emphase, transposé, d'une troublante tendresse. Dans « Regarde-moi, Leonard », Francine Allard détourne les codes de l'entrevue, pour le plus grand plaisir de tous. « Devant le regard surpris des spectateurs, je sortis. Je pleurais comme quand j’étais fillette. Quelqu’un avait bombardé ma vie. Je  n’oublierais jamais cet homme sombre qui avait, un court moment, enluminé mon avenir. » Mélanie Gélinas use d'une plume particulièrement ciselée pour évoquer une rencontre impromptue (fictive? quelle importance au fond...) avec le géant . « J'ai vu celui qui disait, sur je ne sais plus quelle tribune, qu'il voulait devenir pour les jeunes écrivains de Montréal, « un père des rues au style direct et sans concessions ». Et je l'ai suivi. » Pierre-Luc Asselin (« So long, Marianne ») joue la carte du désabusement, Stéphanie Pelletier (« Please Don't Pass Her By ») trace un portrait particulièrement réussi d'amitié teintée d'inquiétude alors que Tristan Malavoy-Racine (« Lucile et Octave ») croque en quelques mots précis un instant précieux. Saluons en terminant Elisabeth Vonarburg qui, avec « By the River Dark » a su se servir (sans s'asservir) de la musique du grand Leonard comme d'une trame sur laquelle juxtaposer l'histoire d'un amour adolescent qui ne connaîtra jamais de lendemain. En deux phrases imparables, elle a certes su rendre un très émouvant hommage à l'icône.   
« Leonard appartenait à la rivière noire et lumineuse de la musique, de la poésie, à la rive obscure des mots où elle avait continué de marcher avec lui. Qu’il fût un homme réel, pourvu d’une identité civile, et même d’une histoire, quelle importance? »

2 commentaires:

Le Papou a dit…

Avec Leonard Cohen, on touche un peu l'âme musical du Papou.

Lucie a dit…

:)
Tu veux que je te l'apporte la semaine prochaine quand on se voit?