mardi 18 septembre 2007

Norman McLaren

Souhaitant présenter le cinéaste Norman McLaren à mes élèves de culture générale, j'ai effectué quelques recherches sur cet artiste exceptionnel. Je ne saurais trop vous recommander le visionnement de certains de ses films dont Voisins (gagnant d'un Oscar), Le merle, Blinkity Blank (commentés ici sur le site de l'ONF). J'ai présenté aux élèves lors d'un atelier trois films, Pas de deux (une étude saisissante de décomposition du mouvement), Begone Dull Care (Caprice en couleurs, une animation abstraite des plus réussies sur une musique du Oscar Peterson Trio) et Voisins, particulièrement percutant, même 50 ans après sa conception (le genre de film qu'on n'oublie pas). Même si le langage était forcément fort éloigné de leur imagerie habituelle, tous ont remarquablement réagi. Voici quelques notes rédigées pour le programme OSM « Hommage à Norman McLaren » qui sera présenté les 2 et 3 octobre prochains. Quatre films de McLaren seront alors présentés sur écran géant, alors que l'OSM jouera la trame sonore « live ».


Expérimentateur extraordinaire, Norman McLaren (1914-1987) reste un géant incontestable du cinéma d’animation canadien. Il fréquente d’abord l’École des beaux-arts de Glasgow en décoration. Très rapidement, il adhère à la Glasgow Film Society et découvre les chefs-d’œuvre d’Eisenstein, Poudovkine et Fishinger. Impatient de s’approprier le medium, il commence par peindre directement sur la pellicule dont il a auparavant gratté l’émulsion de façon à la rendre transparente. Dès 1935, deux de ses films remportent des prix au Scottish Amateur Film Festival. Impressionné par le talent du jeune cinéaste, John Grierson lui offre un emploi au General Post Office Film Unit de Londres. En 1936, McLaren couvre la guerre civile espagnole, expérience qui aura un profond impact sur les choix de carrière qu’il effectuera et la façon dont il traitera certains sujets cinématographiques (Hell Unlimited, par exemple). Quand il ressent les premières secousses de la Deuxième guerre mondiale, il émigre à New York. Deux ans plus tard, en 1941, Grierson, devenu premier commissaire du gouvernement à la cinématographie, l’invite à se joindre à l’Office national du film du Canada, organisme auquel son nom restera profondément associé.
Au cours de sa carrière, il signera 59 films qui misent avant tout sur la transmission de l’émotion plutôt que l’étalage de la technologie, malgré leur côté expérimental. Dans certains films, plutôt que d’utiliser la technique traditionnelle du dessin animé, il peint directement sur la pellicule ou la gratte (Love on the Wing ou Blinkity Blank, palme d’or à Cannes). Il superpose des personnages sur un décor (Love on the Wing) ou mélange animation et scènes d’action (Hell Unlimited). Il perfectionne également la technique de la pixilation. Dans Voisins, un chef-d’œuvre du genre, les acteurs sont filmés image par image, puis animés, créant une impression de continuité saisissante dans le mouvement. Fable cinématographique pacifiste qui lui a valu un Oscar, Voisins raconte l’histoire de deux hommes qui en viennent à tout détruire avant de s’entretuer pour la possession d’une fleur surgie sur la ligne mitoyenne de leurs terrains. (La version originale, jugée trop violente, a d’ailleurs été tronquée, pour que le film puisse être mis en compétition.) McLaren dira plus tard que si tous ses films devaient être brûlés sauf un, il choisirait de sauver Voisins.
Dans d’autres films, il dessine directement sur la piste sonore optique du film. Grâce à un astucieux système de repérage, il établit des correspondances entre les traits et des notes de musique, ce qui lui permet de réaliser des ondes sonores des plus complexes (À la pointe de la plume). Les implications de la méthode ont d’ailleurs suscité un intérêt considérable chez les compositeurs de musique électroacoustique, dont Maurice Blackburn (qui participera notamment à la création de Lignes verticales et Lignes horizontales).
La musique joue un rôle essentiel dans la grande majorité des films de McLaren, qu’il utilise des chansons folkloriques (Le Merle), des sonorités venues d’ailleurs (on peut entendre Ravi Shankar et Chatur Lal dans Il était une chaise et des flûtes de Pan sont entendues dans Pas de deux), des œuvres classiques (Glenn Gould interprète Bach dans Sphères) ou du jazz (Eldon Rathburn est mis en lumière dans Short and Suite et le Trio d’Oscar Peterson dans Begone Dull Care).
Les œuvres de McLaren reposent toutes sur un sens admirable du rythme, tant au niveau de la trame sonore que du flot narratif. Pour lui, le cinéma d’animation n’est pas tant le prolongement d’un art statique mais plutôt une expression artistique très proche de la danse, ce qui le pousse à utiliser et décomposer le mouvement dans presque tous ses films. Le cinéma le plus pur communique des pensées et des émotions par le mouvement. « Un film pour moi, c’est un peu comme une danse, a-t-il expliqué en entrevue. La chose la plus importante dans un film, c’est le mouvement. Peu importe ce que vous faites bouger, que ce soit des gens, des objets, des dessins, peu importe comment vous le faites, c’est toujours une sorte de danse. C’est comme ça que je vois le cinéma. »


Ici un dessin saisissant de McLaren, Sonata. Bonne découverte!

1 commentaire:

Michel a dit…

Tu trouveras sur le site suivant:

www.4dart.com

l'information sur un spectacle-hommage à Norman McLaren (acteurs qui interagissent avec des images virtuelles projetées dans l'espace).

Michel