mercredi 29 octobre 2008

Omaha Beach



J'aime que les livres aient une histoire et que, à travers eux, on puisse retracer une partie de la nôtre. J'ai rencontré hier Sébastien Filiatrault (notre recrue du mois) et il évoquait qu'il aimerait pouvoir retracer le fil qui a mené d'un livre à un autre (suggestion d'un ami, hasard, choix conscient, toutes ces réponses, autre réponse). Intéressant périple en perspective...

Samedi, j'étais en librairie, souhaitant me procurer Le ciel de Bay City de Catherine Mavrikakis, livre dont on dit le plus grand bien un peu partout. (Pierre Cayouette sur son blogue de L'Actualité n'hésite pas à parler du choc de la rentrée littéraire québécoise.) Je me suis donc dirigée vers la section « littérature québécoise » et me suis penchée vers les M mais, au lieu de mettre la main sur le livre en question, j'ai plutôt pris Omaha Beach, pièce de théâtre de l'auteure. Il n'y a pas vraiment de hasard... Je venais de compléter l'écriture d'un texte qui débute lors du débarquement en Normandie et là, clin d'oeil, une pièce qui se déroule dans le cimetière américain. En plus, ce livre est en nomination pour un prix du Gouverneur Général: raison de plus pour céder. (Pour la petite histoire, j'ai aussi acheté Le ciel de Bay City, surtout que la librairie offrait une super promo 20 % de rabais sur le titre le plus cher des deux. Fin de la parenthèse.)
Le soir même, je m'y suis plongée, pour en ressortir quelques heures plus tard, comme si j'avais passée la soirée au théâtre. L'univers est très particulier et il faut accepter de lâcher prise sur la réalité. L'avertissement de l'auteure est d'ailleurs clair: « Cet oratorio ne se veut en rien réaliste. Tout peut y frôler le ridicule. L'effet d'étrangeté y permettra le tragique. » Une famille (grand-maman, maman et son mari, les deux filles dont l'une voit l'avenir) se rend au cimetière américain pour se recueillir sur les tombes des frères jumeaux de la grand-mère: un périple en apparence banal, comme en font des milliers de touristes. Pourtant, dès le début, on sent que tout ne sera pas si simple. Le soir venu, en effet, le cimetière s'éveille, les soldats morts au front faisant la fête et revivant ad nauseam leur jeunesse perdue, au grand dam du gardien qui doit ramasser après eux. Les univers des vivants et des morts finiront par se croiser, deux des femmes de la famille décidant de revenir au cimetière en pleine nuit.

Tragédie grecque, manifeste contre la guerre, ce texte aborde la très fine ligne entre vivants et morts, libération et culpabilité, jeunesse folle et regrets, rêve et réalité. Même si le texte se lit particulièrement bien, je me suis prise à imaginer une production de l'oeuvre sur nos planches. Celle-ci se devrait être extravagante mais particulièrement encadrée, la musique des voix se mêlant au souffle de la mer, aux cris des corneilles et à la machine terrifiante de la guerre. Puissant!

3 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai aussi entendu parler de cette auteure, du moins de son dernier roman. La pièce semble aussi être très bien! Notons donc allègrement le tout!!!

Venise a dit…

Moi qui ais déjà monter "La guerre de Troie n'aura pas lieu" peut affirmer que les pièces avec de telles teneurs dramatiques sont très porteuses d'émotions fortes.

Je suis surprise qu'elle soit éditée et pas encore montée.

Lucie a dit…

Karine: je vous reviendrai bien sûr sur son roman...

Venise: il faut croire que personne n'y a encore pensé. Par contre, c'est un texte qui se lit très bien, dont les émotions passent sans problème à l'écrit.